Six mois avant son rappel à Dieu, Le père Marie-Dominique Philippe écrivait à ses frères, à propos des calomnies dont il était l’objet. L’entreprise de destruction de la communauté Saint Jean a commencé il y a bien des années, et ce que nous avons vécu depuis mai dernier en est l’ultime épisode.
Benoit Chrétien
Genève, le 4 février 2006
Cher père Jean-Pierre-Marie,
Je profite de mon passage à Genève, où j’ai un peu de temps, pour vous adresser par écrit ce à quoi je réfléchis et ce pour quoi je prie depuis plusieurs jours concernant ce que le journal Golias a publié.
En effet, je demeure fondateur, donc responsable de la Communauté Saint-Jean en face de Dieu. Ces derniers éléments montrent une attaque directe contre la Communauté, comme si elle était condamnable en tant que communauté ; on agit comme si, à l’intérieur de notre communauté, l’ordre de sagesse, l’ordre chrétien, n’était plus respecté. Ces attaques vont très loin et veulent supprimer le respect et la confiance que le peuple chrétien et spécialement les parents, doivent avoir envers la Communauté. Aussi, je crois de mon devoir de dire publiquement, par le Prieur général, ce que, en face de Dieu et de Marie, je pense devoir rectifier et dire.
Personnellement, je veux, devant Jésus, à cause de l’évangile, pardonner. Je veux pardonner à celui qui est à la source de toutes ces calomnies. Pardonner, c’est régler fraternellement la question en face du Christ qui nous demande de pardonner à tous sans limite.
Je pardonne à titre personnel. Mais en tant que fondateur, je ne peux pas accepter qu’on salisse mes enfants de cette manière-là.
L’attaque qui est faite contre moi rejaillit sur l’Ordre dominicain que je n’ai pas quitté et auquel j’ai toujours voulu rester fidèle. Je demande pardon à mon Ordre des ennuis que je lui cause. Mais je tiens à dire que ce dont je suis accusé ouvertement n’est pas vrai et que ces accusations reposent sur des jalousies.
Quant aux attaques contre la Communauté Saint-Jean, en face de Dieu, en face de l’Église, en face des frères responsables, j’affirme que toutes ces accusations reposent sur une vision erronée des intentions profondes des frères et de la Communauté. On attaque la Communauté par un « chef-d’œuvre » d’amalgame qui, à la fois, masque les véritables intentions des personnes accusées et dévoile les intentions de ceux qui accusent. On fait feu de tout bois, pour montrer que la Communauté Saint-Jean est indigne de la confiance des chrétiens et, spécialement, des parents des frères.
Dans ces attaques, intentions profondes et réalisations extérieures sont constamment confondues. C’est l’amalgame le plus terrible, parce qu’il lutte directement contre l’autorité personnelle de chacun. Le problème de la conscience personnelle est quelque chose de tellement secret, que seul Dieu a le droit d’en juger. Les hommes n’ont pas le droit de juger des intentions. Or, dans toutes ces attaques, on se sert de n’importe quoi pour calomnier les intentions et les personnes.
On confond aussi les choses en faisant que ce qui se déroule dans le temps, avec toute la relativité des événements passagers, est ramassé dans une vision globale qui accuse et charge les personnes d’une responsabilité massive qui n’est plus humaine.
La collectivité et l’individu sont aussi constamment confondus. On connaît cette façon de procéder des régimes marxistes. Il est terrible de voir que, dans notre pays, ce procédé est employé tout en se donnant l’apparence d’un réquisitoire juste. Tout cela avec l’intention très nette de supprimer toute crédibilité à la Communauté et de la casser, prétendument au nom de la justice.
Plus je réfléchis à ces accusations, plus je vois que tout est centré sur la manifestation et non pas sur la vérité profonde des choses. Tout est fait pour intensifier les apparences et fausser les intentions et leur vérité. Or, dans un regard juste, ne devons-nous pas toujours bien distinguer les deux ?
Étant donné que nous sommes religieux, nous ne voulons pas attaquer en justice comme de simples citoyens soucieux de sauvegarder leurs droits mais respectant que d’autres puissent avoir des idées opposées aux leurs. Nous sommes au service de l’Église. Mais personne ne peut nous refuser le droit de chercher la vérité philosophique et théologique jusqu’au bout. La Communauté Saint-Jean n’est pas une secte. Elle est pleinement d’Église et, si nous pardonnons le tort qui nous est fait injustement, nous devons maintenir notre droit légitime de chercher la vérité. L’Église doit nous y aider et nous défendre.
En tout cela, c’est à vous, cher père, de prendre les décisions que, en conscience, vous estimez devoir prendre. Je ne veux pas prendre une place qui ne serait plus la mienne mais je crois que les intentions du fondateur, dans un cas aussi extrême, doivent être nettement affirmées.
Je souhaite que cette lettre soit communiquée aux frères, ainsi qu’à Monseigneur Joseph Madec, Monseigneur Gaston Poulain, Monseigneur Raymond Séguy et le Cardinal Philippe Barbarin.
Frère Marie-Dominique Philippe, OP
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